Fraternité ou corporatisme ?

Se serrer les coudes devant une cause juste, permet de faire avancer les choses. La "Marche Blanche" qui a eu lieu en Belgique suite à l'affaire Dutroux en est un exemple magnifique. Mais lorsqu'un clan se mobilise pour défendre l'un des siens - alors qu'il est coupable, toutes les valeurs sociales risquent de déraper, car ce n'est plus de la fraternité, c'est du corporatisme, fondé sur le parti-pris et l'aveuglement. (Exemple : ce que je viens de dire sur certains religieux). Cela conduit à n'accepter aucune critique, sous prétexte que le corps tout entier en serait éclaboussé. C'est le fonctionnement classique de l'ego. Mais le remède est pire que le mal, car cela débouche sur le respect de la fonction, et le mépris de l'être.

Aujourd'hui, on en parle beaucoup à travers l'expression : Ne pas faire d'amalgame. Ce qui prouve qu'on ne peut plus s'abriter derrière les non-dits ou le secret. C'est un premier pas, très important, mais actuellement valable surtout pour les communautés auxquelles on n'appartient pas. Il faudrait que ce soit aussi valable pour les enseignants qui regardent leurs collègues, les prêtres qui regardent leurs officiants, etc...

Or; cette culture du secret, en face de l'inavouable, a toujours été la norme:

Respecte ton père et ta mère... même s'ils sont mauvais. Hélas, cela donne le droit implicite d'abuser de son pouvoir sur ses propres enfants, en répétant les dysfonctionnements de la génération précédente, tout simplement parce qu'on ne les a pas remis en cause. Cela peut venir du fait qu'on en les a pas vus, mais aussi - souvent - qu'on n'a pas osé les juger comme tels.

Respecte les vieux... parce qu'ils ont l'expérience. C'est vrai, mais l'expérience ne sert pas toujours à améliorer l'individu, et les limites de la jeunesse s'aggravent souvent avec l'âge. Respecter quelqu'un parce qu'il est vieux, implique qu'on peut ne pas être respecté parce qu'on est jeune, ce qui est douloureux, car ce n'est pas l'âge qui fait un être humain. Respecter l'âge a souvent pour conséquence d'oublier cet être humain, puisque, dans cette logique, un adolescent épris de vérité sera obligé de s'incliner devant la volonté inadmissible d'un père ou d'un grand-père indigne, parce qu'ils sont plus vieux que lui.

Respecte les riches... parce qu'ils sont au-dessus de toi. Toutes les iniquités sociales de toutes les époques et de tous les pays ont eu ce principe pour base. Aujourd'hui, en Occident, l'argent reste un outil de pouvoir, et celui qui n'en a pas s'incline presque automatiquement devant celui qui en a, même si celui-ci ne le demande pas. Mais la demande est souvent implicite. Encore une fois, où sont les vraies valeurs ? Elles s'effacent obligatoirement si l'argent me donne des droits que je n'aurais pas sans lui, sur le plan moral. Seules, les choses matérielles devraient être connectées à l'argent. Dès que le pouvoir s'en mêle, la corruption est là. Il n'est pas mauvais d'avoir de l'argent, c'est l'usage qu'on en fait qui peut être néfaste. Par ailleurs, lorsque la différence de niveau de vie entre le plus démuni et le plus riche dépasse un certain seuil dans une société, c'est que l'argent est devenu l'outil de l'ego au niveau collectif. Et cette société s'effondrera un jour ou l'autre, car ses valeurs sont injustes.

Respecte les enseignants... même s'ils sont injustes, car ils ont le savoir. Là encore, il s'agit de terrorisme, même si celui-ci n'est qu'intellectuel. Moi qui ai été pendant 25 ans dans l'Education Nationale, je suis bien placée pour savoir que ce terrorisme se ramifie dans le corps enseignant lui-même, selon l'importance de la matière enseignée... et le diplôme de l'enseignant. Le représentant de la musique ne pèse pas lourd devant le représentant du français, de même que le professeur de collège est méprisé par le certifié, qui est méprisé par l'agrégé, qui est méprisé par le prof de fac. Le paradoxe pourrait être amusant. Il est surtout navrant, parce que la qualité de l'enseignement dispensé dépend essentiellement des qualités de coeur. Et comme les connaissances extérieures nourrissent surtout l'ego, les plus diplômés sont parfois les moins efficaces. Je précise que je ne fais pas de règle générale. Je dis simplement que les profs se soutiennent quand ils se sentent en danger, et que cela les fait basculer dans un corporatisme étroit, qui leur fait à terme plus de mal que de bien.

Respecte la force... quand tu es le plus faible, mais impose ta loi dans le cas contraire. Le problème, c'est que le père est plus fort que l'enfant, et que le mari est plus fort que sa femme. Lorsque l'ego utilise cette force musculaire, on se retrouve dans le règne animal, et cela est bien peu glorieux pour notre humanité.

Respecte le pouvoir religieux... Crois ce qu'on te dit sans discuter, car c'est la parole de Dieu. Cette base est peut-être la plus dangereuse de toutes, car cela donne le droit, qu'on le veuille ou non, de répercuter cette intolérance sur plus faible que soi. En effet, si je crois en un Dieu qui punit, cela me donne automatiquement le droit de punir, et la chaîne est sans fin: le prêtre m'ordonne de faire pénitence, et mon ego me persuade que je suis coupable. Entre les deux, on trouve toutes les exactions, toutes les injustices, toutes les perversions de notre humanité - fondées sur le rapport de forces. Dans cette analyse, le dieu que je vénère n'est rien d'autre que mon propre ego. Le Dieu véritable est aussi à l'intérieur de moi, mais il est connecté à mes valeurs humaines. Il est mon âme. Il est mon humanité.

Respecte le pouvoir politique... et obéis à ton tyran. Quand le peuple se rebelle, c'est que l'ego du tyran est allé trop loin... ou que l'ego du peuple ne peut plus l'empêcher de penser qu'il peut mettre fin à la situation qu'il subit. Car, lorsque un groupe suffisamment important de gens se mobilise pour changer l'ordre établi, les forces générées se matérialisent dans les événements. Autrement dit, le plan extérieur est la projection du plan intérieur. Quand celui-ci est sain, la situation extérieure s'assainit. C'est le signe que l'âme est à l'oeuvre. Quand c'est l'ego qui agit, les choses s'aggravent automatiquement.

Cela vient du fait que son discours est basé sur l'apparence et le pouvoir.

= Incline-toi devant la fonction, même si elle est représentée par quelqu'un qui la pervertit. Sinon, gare à toi !

En somme, respecte tous ceux qui sont plus forts que toi : C'est la loi de base de l'ego.

Le dealer et le proxénète cèdent au mirage de l'argent facile, proposé par leur ego, au détriment du respect d'autrui. Le drogué et la prostituée ne se respectent pas eux-mêmes : dominés par un ego qui les écrase ou les aveugle, ils deviennent tout naturellement la proie du dealer et du proxénète.

Si nous voulons réellement sortir de cette impasse, il va falloir regarder notre ego en face, et lui enlever son pouvoir. Alors, nous accèderons aux vraies valeurs, celles de l'âme, celles du coeur, celles de l'être.

Alors, nous respecterons les êtres humains : les enfants, les femmes, les faibles, les pauvres, les noirs, les SDF, les obscurs, les sans-nom... et les autres aussi (les riches et les puissants), s'ils sont respectables.

Mais tout cela ne se fera pas sans le respect de soi-même, installé sur le développement de l'âme et la réduction de l'ego, à l'intérieur de chaque être humain, y compris celui des faibles et des opprimés.

"La délinquance, c'est l'affaire de tous, et pas seulement de l'Etat." (J.T. du 06 Mars 02 / France2). C'est juste, mais tant que l'ego gouvernera chaque être humain (sans qu'il le sache), aucun parti politique, aucun idéal philosophique, ni aucune croyance religieuse, ne pourront installer la paix et la tolérance sur terre - cette terre si souvent appellée "une vallée de larmes". Il est facile de comprendre pourquoi:

Le code pénal vise à mettre en oeuvre une Justice juste par définition. Mais QUI va contrôler ce qui se passe à l'intérieur des juges ? Car chaque juge peut être corrompu par son propre ego... Et il en est de même pour les policiers, les politiques, les scientifiques, et tous les étages de la société : Banquiers, notaires, avocats, médecins, psychologues, gourous, prêtres, artistes, écrivains, acteurs, professeurs, commerçants, employés, ouvriers, chômeurs, délinquants, proxénètes, gangsters, voyous, assassins et criminels en tous genres, mais aussi : monsieur et madame tout-le-monde, y compris les personnes âgées, les parents, les adolescents et les enfants - et ceci dès la maternelle.

Ai-je oublié quelqu'un ???

La délinquance et la criminalité ne touchent pas que les jeunes. Elle gangrène tous les échelons de la société, partout, à la surface de la terre. Voilà pourquoi, effectivement, elle est l'affaire de tous, et non pas seulement de l'état.

La solution ?

Il me semble évident que la première chose, c'est de le savoir. Mais il faut aussi que chaque être humain identifie son propre ego dans son monde intérieur. Pour cela, le rêve est l'outil idéal. Voici un exemple de rêve classique chez les garçons:

"Je me bats contre quelqu'un. Cela peut être un copain, un prof, mon père ou encore un inconnu. C'est un rêve qui m'épuise, car il dure toute la nuit, sans issue décisive. Je sais pourtant qu'il faut absolument que je sois vainqueur, car ma vie en dépend."

En général, ce rêve alimente dramatiquement l'agressivité du jeune, car son ego lui souffle qu'il doit le comprendre au premier degré, et il a donc ensuite tendance à le vivre sur le plan de sa vie éveillée en se battant réellement : coups, insultes, menaces etc... C'est du reste la raison pour laquelle c'est souvent un rêve récurrent, preuve qu'il n'a pas été compris, car, une fois que le message est passé, le rêve ne revient plus (sauf s'il y a récidive dans la vie éveillée). Ce type de rêve met en scène le combat que le rêveur doit livrer contre son ego. Cette compréhension du rêve désamorce complètement et souvent immédiatement l'agressivité du jeune.

Inversement, si le rêveur reste au premier degré, il peut tenter de vivre son rêve sur le plan extérieur. C'est ainsi qu'un jeune parricide avoua qu'il avait tué son père, suite à un rêve qui lui disait de le faire. Il est essentiel de comprendre qu'il y avait deux vérités possibles : Soit son père était effectivement indigne. Soit il n'en était rien, mais son ego le lui faisait croire.

Dans le premier cas, son père était vraiment représenté dans le rêve, et ce rêve disait au jeune homme qu'il devait absolument tuer non pas son père, mais le pouvoir que ce père avait sur lui. Dans le second cas, il symbolisait son ego, et c'est cet ego qu'il devait tuer. Si je me fie à ma pratique des rêves, je pense que la seconde solution est sans doute la plus probable.

Le premier degré envoie l'homme en prison, le second degré le met sur le chemin de sa liberté intérieure.

Autre question : Que faire si on n'a aucun souvenir de ses rêves ? Il est alors nécessaire de faire appel au "rêve éveillé" ou à la "visualisation" comme dans l'exemple du petit Hugo.

En état de relaxation, on appelle une image symbolique de l'ego : monstre, serpent, araignée, dinosaure, renard, loup etc... Les symboles ne manquent pas. Peut également apparaître quelqu'un que le rêveur connaît et qu'il n'aime pas. Cela fera parfaitement l'affaire. Le plus délicat est d'identifier l'ego derrière quelqu'un que le sujet admire. Là, il faut vérifier en doutant, en essayant d'enlever le masque derrière lequel l'ego s'est caché. En principe, cela marche très bien : le sujet voit la personne se transformer en monstre, ou encore, son regard devient perfide ou inquiétant. C'est la preuve que l'ego s'était camouflé sous une apparence positive. (cf. Fonctionnement et Exemple).

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Pour conclure, le manque d'amour est fréquemment à la base des dysfonctionnements futurs, mais l'excès également, surtout s'il est fondé sur une permissivité sans discernement et la réalisation immédiate des moindres désirs de l'enfant. L'ego utilise toutes les situations difficiles pour prendre le pouvoir. Mais il est capable de transformer du positif en négatif. En fait, il est capable de tout pour réduire l'homme en esclavage. Il ne comprend que la force et génère la peur. Par ailleurs, le seul amour dont il soit capable est à la fois égoïste et conditionnel, avec gratitude obligatoire, ce qui pervertit tout.

Or, il est impossible de se battre contre lui, si on ignore son existence à l'intérieur de soi-même. Pire : il est capable de faire croire à sa victime qu'il est sa véritable identité. Il est urgent de le comprendre, car cela pourrait bien être la véritable solution à tous les problèmes de toutes les sociétés à la surface du globe.

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