PSYCHANALYSE DE LA BIBLE

LA NAISSANCE DE JESUS

L'hypothèse de base, c'est que les Ecritures utilisent la même langue que les rêves. Si cela est juste, elles s'interprètent forcément de la même façon. Je vais analyser ici quelques extraits des Evangiles, mais cette hypothèse est valable pour tous les textes sacrés, quelle que soit leur origine.

La naissance de Jésus est donnée dans Matthieu et dans Luc. Marc n'en parle pas, et démarre directement dans la vie d'adulte de Jésus. Quant à Jean, il en donne une version beaucoup plus intérieure, lorsqu'il dit que celui qui n'est pas né une deuxième fois, ne peut devenir son disciple. Cela semble être une énigme pour Nicodème, à qui il s'adresse. Il lui précise alors que cette naissance doit être d'eau et d'esprit. Je vais connecter ces deux approches, en leur donnant le même sens, intérieur et psychique, cela va de soi...

J'ajoute que la vie intérieure, exprimée par le rêve, est obligatoirement connectée au vécu du sujet. C'est pourquoi je vais essayer de déduire un événement extérieur de la vie de Jésus, à travers les textes analysés. Bien entendu, ce ne sont que des hypothèses, dont la base repose sur mon expérience de spécialiste du rêve. Lorsque le rêveur me dit que mon interprétation correspond exactement à ce qu'il a vécu ou à ce qu'il pense, je sais que j'avance en terrain sûr. Le problème, ici, c'est que le rêveur (Joseph) restera muet - que j'aie raison ou que j'aie tort. Gardez-le toujours à l'esprit.

Voyons d'abord ce que dit Matthieu, Chapitre 1, versets 18-24.

Le dogme et les explications réalistes.

Voici de quelle manière arriva la naissance de Jésus-Christ. Marie, sa mère, ayant été fiancée à Joseph, se trouva enceinte par la vertu du Saint Esprit, avant qu'ils aient habité ensemble.

Toutes les analyses de cet événement sont basées sur l'acceptation à priori d'un fait historique. On y croit, ou on n'y croit pas, mais ce verset 18 n'a jamais été interprété autrement que par une vérité miraculeuse, ou une imposture destinée à cacher la 'faute' de Marie. Les deux camps s'affrontent et restent sur leurs positions. De multiples explications ont fleuri pour justifier la grossesse hors mariage de la jeune fille. Certains pensent que Joseph était veuf, avec un ou des fils adultes d'un premier mariage, et l'un d'eux aurait séduit Marie, peut-être même l'aurait-il engrossée sans qu'elle s'en rende vraiment compte, sorte de viol subi par ignorance ou innocence. D'autres pensent que Joseph avait juste pris un peu d'avance sur le mariage, ce qui l'aurait ensuite poussé à 'réparer' une faute qui venait de lui... Toutes ces hypothèses mettent en avant un Joseph beaucoup plus âgé que Marie, ce qui permet de supposer que les frères et les soeurs de Jésus, cités dans le Nouveau Testament, n'étaient que ses demi-frères. La virginité de Marie, qui n'est affirmée dans les textes que avant la naissance de Jésus, peut ainsi être préservée durant toute sa vie. C'est ce qu'exige le dogme de l'Immaculée Conception: Elle est née 'sans tache', a conçu sans sexe, et est restée vierge jusqu'au bout.

Il va sans dire que les tenants du miracle se récrient d'horreur devant les hypothèses énoncées plus haut. Pourtant, le scepticisme ne touche pas que les incroyants. Les protestants, par exemple, refusent la grossesse virginale de Marie, en s'appuyant sur les évangiles eux-mêmes, qui évoquent très naturellement les frères et les soeurs de Jésus. Les catholiques réfutent cet argument, en assurant que ces termes étaient utilisés à l'époque pour les cousins et les amis, car même l'idée d'un second mariage les gêne. On voit ici clairement que les interprétations vont dans le sens de la croyance, au lieu de s'appuyer sur le sens des mots. Quand il faut interpréter quelque chose qui ne semble pas en avoir besoin, afin de fortifier la croyance, c'est que celle-ci souffre d'une inquiétante fragilité.

Il faut donc absolument que Marie ait conçu Jésus sans l'intervention de Joseph, sans quoi cela leur enlève la vénération de l'Eglise.

Elle est bien superficielle, la foi qui repose sur l'exigence d'un miracle. Dans ce cas, il est évident que les êtres humains ordinaires ne trouveront jamais grâce aux yeux de cette même Eglise. C'est la condamnation implicite de la sexualité et du corps. Mais le simple bon sens ne gagne rien à cette approche.

Je fais l'hypothèse qu'on peut parfaitement réunir la vérité du corps avec celle de l'âme, l'une ne pouvant nuire à l'autre.

Ma traduction symbolique.

Elle entérine ce passage comme une vérité, certes, mais une vérité d'ordre intérieur. En aucun cas, cela ne nous raconte une histoire de grossesse spontanée, de nature divine. La mythologie foisonne du reste de ce type de légendes. Il n'est qu'à se souvenir de la naissance d'Hercule, ce 'demi-dieu', né des oeuvres de Zeus et d'une mortelle, Alcmène. Les Chrétiens jettent sur ce mythe un regard méprisant, et l'avalent ensuite sans s'étrangler quand il est exposé dans leurs propres Ecritures.

Tout devient très différent si cette histoire se passe à l'intérieur d'un être humain, dont les deux composantes (le masculin et le féminin) sont symbolisées par les deux personnages, Joseph et Marie. C'est la mise en scène de l'union intérieure, qui permet la naissance d'un enfant psychique, appelé ici Jésus, ce qui signifie Sauveur. Cet enfant a effectivement la capacité de sauver l'âme humaine du pouvoir de l'ego. Or, le texte fait ensuite intervenir un rêve... Il est intéressant de remarquer le changement de statut de Marie : De fiancée, elle devient épouse dans le songe.


Joseph, son époux, qui était un homme de bien et qui ne voulait pas la diffamer, se proposa de rompre secrètement avec elle. Comme il y pensait, voici, un ange du Seigneur lui apparut en songe, et dit : Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre avec toi Marie, ta femme, car l'enfant qu'elle a conçu vient du Saint-Esprit ; elle enfantera un fils, et tu lui donneras le nom de Jésus ; c'est lui qui sauvera son peuple de ses péchés.

Il est important de se souvenir que notre humanité d'il y a 2000 ans voyait le rêve comme la Parole divine, et lui accordait en particulier la faculté d'annoncer l'avenir. Ici, il s'agit bien d'un songe.

La psychanalyse moderne reconnaît le rêve comme la mise en scène de la situation psychique du sujet, à l'intérieur de son inconscient. Mon travail personnel me permet d'affirmer que le rêve de naissance intérieure est effectivement un élément essentiel dans l'évolution de l'être humain, car il lui permet d'accéder à sa véritable identité. Ce rêve, beaucoup de rêveurs le font, sitôt qu'ils ont réussi leur union intérieure, c'est-à-dire la réunion de leur conscient avec leur inconscient. J'ajoute que le peuple, dans les rêves (comme dans les Ecritures), symbolise notre âme.

Lorsque le peuple est dirigé par un tyran, il souffre abominablement, tout comme notre âme, quand elle est dirigée par l'ego. En revanche, lorsque l'être humain réussit à faire naître en lui-même sa véritable identité, cet enfant psychique dont la fête de Noël nous parle chaque année, alors, il est sur le chemin d'une spiritualité authentique, qui le conduit à la paix intérieure de façon sûre. Car c'est bien cet enfant (Jésus-Sauveur) qui doit la gouverner...

Dans l'évangile de Jean, au chapitre 3, voici ce que dit Jésus:

"En vérité, en vérité, si un homme ne naît de nouveau, il ne peut voir le royaume de Dieu. Nicodème lui dit : Comment un homme peut-il naître quand il est vieux ? Peut-il rentrer dans le sein de sa mère et naître ? Jésus répondit : En vérité, en vérité, je te le dis, si un homme ne naît d'eau et d'esprit, il ne peut entrer dans le royaume de Dieu. Ce qui est né de la chair est chair, et ce qui est né de l'esprit est esprit. Ne t'étonne pas que je t'aie dit : Il faut que vous naissiez de nouveau".

Si on rapproche les deux passages, on voit bien qu'il peut y avoir là une clé intéressante. Le rapport de Matthieu fait référence à un rêve, et parle d'un enfant 'conçu' par le Saint-Esprit, c-à-d d'une naissance qui n'a rien à voir avec la chair. Or, cette naissance-là est indispensable pour 'voir' le royaume de Dieu - ou pour 'sauver' le peuple, c-à-d l'âme humaine. Les deux textes s'éclairent l'un l'autre, le premier étant un rêve, et le second étant la traduction du premier. La chair et l'esprit sont ici clairement dissociés. Le corps physique est matière et donne naissance à la matière charnelle d'un enfant ; le corps psychique est esprit invisible et donne naissance à un enfant "spirituel" invisible. On ne doit pas confondre les deux. C'est pourtant ce que nous faisons depuis toujours puisque nous prêtons à "Jésus" une dimension physique.

Selon cette lecture, chaque être humain peut et doit être sauvé (chemin personnel, individuel), mais chacun dans sa peau et dans son monde intérieur. Toutefois, si chaque être humain reçoit ce rêve et le comprend, le niveau collectif s'installera naturellement, et l'humanité sera sauvée.

Il est amusant de constater que les religions, qui veulent toutes sauver cette âme, sont ici battues en brèche par le texte, qui affirme que c'est cet enfant (=âme) qui va nous sauver, et non l'inverse. Encore faut-il réussir à le faire émerger, à le sortir de l'inconscient, afin qu'il devienne conscient, ce qui est la seule façon de lui donner le pouvoir. Et cela, seul le rêve peut le faire, puisque c'est en rêve qu'on peut recevoir l'information. C'est le rêve de naissance. Tant qu'on ne l'a pas eu, on ne peut pas 'voir le royaume de Dieu...' qu'on soit croyant, prêtre, évèque ou Pape. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est Jésus lui-même dans le texte:

"Tu es docteur d'Israël et tu ne sais pas ces choses ?"

Effectivement, on ne sait pas ces choses-là, parce que le rêve a été rejeté comme n'ayant aucun sens, ou accepté au premier degré, comme annonçant l'avenir. Dans les deux cas, on passe à côté de son message. En effet, le rêve donne au sujet une information objective sur lui-même, qui lui permet d'accéder peu à peu à la connaissance de soi, autrement dit de faire croître sa zone consciente, en réduisant son inconscience (=l'ignorance de soi), qu'il ne faut pas confondre avec "l'inconscient" qui nous envoie nos rêves comme autant d'informations essentielles sur nous-mêmes.

Revenons à Matthieu.

Joseph, s'étant réveillé, fit ce que l'ange du Seigneur lui avait ordonné, et il prit sa femme avec lui.

Au premier degré, Joseph se réveille. Cela montre bien qu'il dormait et qu'il avait effectivement reçu un rêve. Mais au second degré, cela signifie que Joseph prend conscience - qu'il cesse d'être inconscient, en ce qui concerne quelque chose d'important pour lui. On peut supposer que ce quelque chose était en lien avec son identité véritable, avec sa croissance spirituelle, avec son humanité.

Or, cette humanité a toujours été (et est encore) menacée par notre animalité intolérante et brutale, orchestrée par l'ego. Les sociétés patriarcales ont toujours été très pointilleuses sur la vertu des femmes. Le texte nous dit sans ambiguïté qu'une grossesse hors mariage justifiait la répudiation. Joseph semble avoir été un homme de coeur, plein de sagesse et de tolérance. Certes, il a pensé à rompre son mariage, mais il ne l'a pas fait, et il est possible que son rêve entérine tout simplement son ouverture d'esprit. En refusant un comportement cruel sur le plan extérieur, il a permis à son âme féminine de faire naître en lui cet enfant psychique, qui était sa véritable identité humaine. Il a échappé au gouvernement sectaire de son ego, qui ne regarde que l'apparence et le qu'en-dira-t-on. Il a laissé parler son coeur - et c'est cela, véritablement, qui permet à l'homme de se rapprocher de Dieu, c'est-à-dire de son âme.

Il semble de plus y avoir une contradiction entre le verset 18 et les suivants, qui font état de Joseph en tant qu'époux, et de Marie en tant que sa femme, alors qu'ils n'étaient en principe que promis l'un à l'autre. Une fois de plus, c'est l'explication de texte qui fait apparaître son sens, car les exégèses classiques ne s'arrêtent évidemment pas à ce genre de détail.

À mon avis, cela n'enlève rien au Jésus que nous honorons, au contraire. Et cela permet à chacun de nous de pouvoir vraiment suivre son enseignement, car nous sommes des êtres humains, comme cet homme d'il y a deux mille ans, et ce qu'il a fait, nous pouvons le faire aussi. Cela change tout. Le Jésus que les Chrétiens vénèrent, il est en eux (l'apôtre Paul ne cesse de le répéter), et il est possible, à chaque instant, de lui donner la direction de notre vie, en choisissant de laisser parler notre coeur, tout simplement.

Dans l'analyse que je propose, Joseph et Jésus sont un seul et même personnage, le premier étant l'homme de chair, le second étant son identité psychique masculine, son âme. De même, on pourrait dire que Jean est un autre aspect de Joseph, qui parle de Jésus comme de son sauveur personnel, mais aussi de celui de l'humanité toute entière, si elle donne la priorité aux valeurs de son coeur. Autrement dit, Joseph serait l'homme social qui, confronté à la différence entre le rêve et la réalité, aurait compris la différence entre l'âme et le corps. Cet événement essentiel dans sa vie l'aurait ensuite conduit tout naturellement à enseigner une autre approche religieuse, dont l'amour et le pardon étaient la base fondamentale. Il se serait alors fait appeler Jean, et aurait écrit l'évangile que nous connaissons, et qui, dans ce cas, serait de première main...

Car la différence est énorme entre les trois évangiles synoptiques et le sien, qui met l'accent sur l'enseignement de Jésus, son mode de pensée, sa façon de voir les choses, sa tolérance et son ouverture d'esprit. Toutes caractéristiques qui l'ont conduit à s'opposer aux dures lois de sa communauté religieuse, au nom de l'esprit, en laissant la lettre de côté.

La loi de l'amour : une loi divine ?

Chaque fois que l'humanité est bafouée, chaque fois que la cruauté règne, on peut être sûr que l'ego a gagné et que l'âme est défaite. Comment une chose aussi simple peut-elle ne pas sauter aux yeux de ceux qui conduisent les peuples? Pourquoi l'amour est-il si difficile à mettre en oeuvre, alors qu'il est si facile à identifier?

C'est que l'ego pousse l'homme à lire les Ecritures au premier degré. Dieu l'a dit, cela me donne le droit de le faire. Mais quel Dieu? Un vrai Dieu peut-il réellement ordonner à ses prêtres de lapider une femme, de la répudier, ou tout simplement de la mépriser? Comment peut-on ne pas remettre en cause un tel Dieu? Parce que ce Dieu-là n'est rien d'autre que notre ego. C'est lui qui parle, et comme il est à l'intérieur de nous, il nous persuade de ce qu'il veut."C'est écrit, c'est donc vrai. Tu peux la tuer. Tu auras servi les intérêts de Dieu (c'est-à-dire les miens)".

Le plus incroyable, c'est qu'effectivement, puisque c'est écrit, c'est que c'est vrai. Mais il nous manque le code pour comprendre le message.

Chaque fois que nous gagnons en humanité, nous servons les intérêts de Dieu, qu'on le nomme Allah, Yahvé, le Christ, Bouddha, Krishna et j'en passe.

L'humanité est le seul critère fiable.

La tolérance, qui est la plus belle qualité humaine, va de pair avec l'ouverture et l'importance de la zone consciente. Certes, il est difficile de mesurer objectivement cette zone. On peut en avoir une approche à travers l'ouverture d'esprit d'un individu, dans la vie éveillée. Manifestement Joseph était largement conscient de la cruauté de son époque, s'agissant de la vertu des femmes. Son humanité reposait sur une base simple, l'amour. Tout son évangile (si Joseph=Jean) pourrait du reste être résumé à travers ce verset connu:

"Aimez-vous les uns les autres, c'est à cela qu'on reconnaîtra que vous êtes mes disciples."

Manifestement, c'est un commandement qui n'a pas paru suffisant aux fonctionnaires de Dieu. Les théologiens ont préféré ratiociner, discuter sans fin sur la lettre et se quereller pour savoir (entre autres) si Jésus allait aux cabinets comme un simple mortel... ou non, parce qu'un Dieu n'est pas censé uriner ou déféquer (!!!). Grave problème. Nous sommes bien loin de cela aujourd'hui, et cela peut prêter à sourire. Pourtant... pourtant la sexualité humaine reste un problème pour l'Eglise, qui s'obstine à s'en mêler, alors que son véritable rôle devrait simplement se borner à être une grande réserve d'amour pour ses ouailles, surtout quand elles sont perdues. Les quatre évangiles affirment tous: "Ne jugez pas, et vous ne serez pas jugés."

Conclusion.

L'histoire de la naissance de Jésus nous raconterait donc un rêve qui a été interprété, semble-t-il, comme une réalité...

Je vais me répéter, mais je ne voudrais pas que le lecteur ait l'impression que j'affirme une chose et son contraire.

Qu'il n'y ait pas de confusion. Le plan extérieur est en général mis en scène dans les rêves. C'est pourquoi j'ai essayé de relier une situation, disons familiale et difficile, à une décision intérieure, pleine de bonté et d'amour, qui aurait été sanctionnée par un rêve indiquant au rêveur qu'il avait fait un choix humain, et que ce choix permettait à son âme d'essence divine de naître en lui afin de devenir son guide intérieur. C'est le Fils de l'homme, auquel nous devons donner le pouvoir, afin de pouvoir dire sans mentir que Dieu est notre Père, parce que nous faisons un avec lui, dans l'amour et la miséricorde.

C'est ce que Jésus a exprimé quand il a dit: Je ne suis pas venu abolir les Ecritures, je suis venu les accomplir. Cela passe par un décryptage qui élimine la barbarie de l'ego au profit de l'humanité, c-à-d qui abandonne la lettre (qui tue) et ne garde que l'esprit (qui vivifie = qui donne la vie).

En tout cas, dans ma lecture, je traite ces textes exactement comme je traite les rêves qu'on me demande de traduire. Cette traduction entérine un état de bien-être intérieur, donné, justement, par la naissance de cet enfant psychique, chez l'homme d'aujourd'hui, comme chez celui d'il y a 2000 ans..

Je ne cherche pas à choquer. Je cherche seulement à trouver un autre sens à un texte qui a toujours été compris sur le plan extérieur uniquement, ce qui n'a pas donné les résultats espérés, en ce qui concerne l'amélioration de notre humanité.

Le sens intérieur me paraît être beaucoup plus important, d'autant que, si Dieu existe, c'est notre âme immortelle qui l'intéresse. Cette immortalité, elle la partage avec lui. Notre corps, lui, a toujours été et sera toujours, soumis à la mort. Puisqu'il a un début, c'est qu'il a aussi une fin. Ce n'est pas le cas de notre âme. Jésus, qui en était la manifestation, et donc qui parlait en son nom, l'a exprimé ainsi: Avant qu'Abraham fût, je suis. C'est l'éternité que toutes les religions prêtent à Dieu, et qui est si difficile à concevoir pour l'homme dont la finitude est inscrite dans le temps. Pourtant, il est écrit aussi: Vous êtes des Dieux. (Jean 10. 34, et Ps 82. 6). Cela pourrait bien signifier que notre véritable identité est d'essence divine, parce que notre âme est Dieu...

En nous identifiant à notre corps, nous laissons de côté notre âme. L'ego prend alors le pouvoir, et dénature notre essence divine, en parlant à notre place, ce qui fait apparaître un Dieu controversé, nié par les uns, exalté par les autres. Mais cette exaltation exige un miracle comme point de départ. C'est ce qui rend Dieu inaccessible, alors qu'un peu de bon sens suffit pour comprendre que le seul véritable miracle, c'est notre humanité, quand elle génère l'amour et la compassion.

Le Dieu auquel nous croyons, qu'on le veuille ou non, nous sert de modèle. S'il agit par représailles, je peux le faire aussi. S'il a perpétré un génocide, pourquoi ne le ferais-je pas, moi aussi, si j'ai le pouvoir un jour ? C'est ce que nous voyons aujourd'hui partout à la surface de la terre. Qui peut arrêter ce fonctionnement ? Manifestement pas le Dieu que nous vénérons, puisque c'est lui qui le génère, quel que soit le nom qu'on lui donne. Qui d'autre, alors ?

L'homme. Oui, l'homme, car lui seul peut le faire et le fera, s'il accepte de renoncer à des croyances qui lui font tant de mal. Cela s'accomplira s'il devient pleinement humain. Seulement et simplement humain. Car les mots doivent avoir du sens, et les hommes peuvent avoir du bon sens. C'est inscrit dans leurs gènes, très probablement, et c'est leur évolution naturelle. C'est pourquoi tant de gens croient malgré tout en l'homme. Je fais partie de ces gens-là. C'est l'humanisme qui nous sauvera, le jour où toutes les théologies mettront l'homme au centre de leur discours et de leur foi.

Malheureusement, toutes les religions, qu'elles soient reconnues ou non, ont toujours privilégié l'aspect extérieur, sectaire, des textes sacrés. C'est pourquoi beaucoup de croyants font le pèlerinage de Compostelle ou de la Mecque, partent chercher la sagesse dans un ashram en Inde, ou plus simplement, vont chaque semaine à la synagogue ou à l'église. Cela répond à un besoin, quelquefois à une urgence, qui sont tout à fait légitimes.

Ils ignorent qu'ils pourraient faire ce voyage dans leur propre monde intérieur (leur terre promise), et que le résultat serait la maîtrise de leur ego, et la croissance de leur humanité.

Cela signifie qu'ils vont chercher dehors ce qu'ils ne peuvent trouver que dedans.

Au bout de ce voyage, que le Christ a accompli, l'homme pourra, comme lui, devenir ce qu'il est vraiment, devenir ce Dieu qu'il supplie depuis toujours, et qui est sa véritable identité. Il sortira alors de la douloureuse impasse dans laquelle il se trouve encore aujourd'hui.

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