L'EGO, responsable

de tous les dysfonctionnements de notre humanité...

Je suis prête aujourd'hui à défendre cette thèse : J'ai suffisamment de preuves contre lui. Mais le combat que je mène, chacun d'entre nous doit le mener aussi, et voici comment.

La répression.

Si l'être humain est si dramatiquement partagé entre les valeurs du coeur et les valeurs de l'ego, c'est que celui-ci dispose d'un outil puissant : le mental, qui souffle au sujet qu'il a raison de faire ce qu'il fait. En règle générale, (c-à-dire pour monsieur ou madame tout-le-monde), l'ego intervient chaque fois qu'il y a dispute, conflit, remarques acerbes, manipulation, mauvaise foi, ragots etc... Il me semble déjà important de savoir que, dans ces cas-là, c'est l'ego qui a parlé, mais la personne s'est identifiée à lui, si bien qu'elle croit sincèrement que son discours était le sien. Cela est monnaie courante, et on s'accommode en principe de cette situation.

Un enfant dont l'ego n'a pas été cadré au départ, court le risque de subir le terrible impérialisme de celui-ci, puisque personne ne lui a posé de limites. S'identifier à lui, c'est perdre toute possiblité de le contenir. Un proverbe anglais dit que le meilleur gardien de la vertu d'une fille, c'est elle-même. C'est vrai aussi pour le délinquant, car il est bien entendu impossible de mettre un flic derrière chaque jeune. C'est pourquoi le flic en question, c'est lui-même. Mais pour qu'il en ait envie, il faut lui expliquer ce qui se passe réellement en lui, et lui donner les moyens de juguler son propre tyran. L'abus de pouvoir de l'ego commence avec les caprices et les exigences vis-à-vis de la famille, continue par des incivilités avec les étrangers, puis l'agressivité verbale s'installe, suivie de l'agressivité physique vis-à-vis de ses pairs, tout cela s'intensifie à travers la manipulation, le harcèlement et, si rien ne l'a arrêté, le jeune peut basculer dans le racket, le vol, le viol, le crime et l'assassinat. (voir le mot Haine dans le Dictionnaire).

Dans l'émission "Envoyé Spécial", le dossier du Jeudi 18 Avril 02 sur les enfants-tyrans, était assez explicite quant aux résultats d'une éducation trop permissive, et les éducateurs ont clairement dit qu'il fallait savoir dire non. Mais à l'évidence, cela ne suffit pas lorsque l'ego a pris la place de l'être humain (jeune ou vieux, fille ou garçon). S'il est indispensable d'expliquer la présence de cet ennemi, il est surtout essentiel de permettre à chacun de le voir. Et pour cela, il faut le visualiser. Car si l'inconscient envoie l'image d'un démon qui nargue le sujet, celui-ci va comprendre qu'il doit retourner son agressivité contre "son diable d'ego", et il cessera d'avoir envie de taper sur son voisin ou sur son camarade de classe. C'est là qu'il peut se reconnecter avec sa véritable identité.

L'ego est une sorte de locataire-cambrioleur qui s'installe dans notre monde intérieur, et qui essaie de prendre toute la place, au détriment du véritable propriétaire (notre âme = notre véritable identité).

Dans le cas de la délinquance, l'ego est un prédateur qui exerce ses abus de pouvoir sur autrui.

Dans le cas de la déprime et du suicide, il les exerce sur le sujet lui-même, et le pousse à se détruire.

Dans tous les cas, l'ego obéit à une règle absolue : il s'attaque à plus faible que lui. Le patron contre son employé (le harcèlement moral), les garçons contre les filles (les tournantes), les grands contre les petits (le racket), l'adulte contre l'enfant (la maltraitance verbale et physique, tous les abus, y compris les abus sexuels), le gangster armé contre sa victime désarmée (toutes les exactions sociales), la force brutale contre la faiblesse (les violences conjugales, le viol et le meurtre). Il n'y a pas de quoi être fier, mais celui qui se livre à ce type d'acte est complètement habité par son ego, et c'est la raison pour laquelle il ne peut pas lui résister. Il obéit à une pulsion, un ordre qui lui viennent de l'intérieur, et qu'il accomplit, persuadé qu'il en a le droit : son ego le commande, et il n'a pas conscience d'être sous la coupe d'un monstre, puisque c'est l'ego qui raisonne à l'intérieur de lui, et l'ego a toujours raison... On ne peut pas discuter avec lui, ni du dehors, ni du dedans.

C'est du reste pourquoi les thérapies comportementales sont si peu efficaces. Tant que notre humanité ne fera pas la différence entre son être véritable et son ennemi intérieur (entre son âme et son ego), tous les dysfonctionnements qui viennent actuellement à la lumière de l'information, ne pourront être enrayés. Et chacun d'entre nous est logé à la même enseigne. Cela explique tous les dérapages : celui du prêtre comme celui du responsable politique, celui du père comme celui du fils, celui de l'enseignant comme celui de l'élève, celui du puissant comme celui du faible.

Mais le puissant finira toujours par trouver plus puissant que lui, et deviendra alors victime à son tour. C'est le cas d'un jeune qui devient bourreau en participant à une exaction parce qu'il est sous la coupe d'un chef dont il est aussi la victime. C'est aussi l'explication des règlements de comptes entre mafias rivales. Car le gouvernement de l'ego est fondé sur la loi du plus fort, et il est très rare de rester le plus fort toute sa vie.

Le modèle animal est ici très visible: le mâle dominant (ou parfois la femelle) est obligé de céder le pouvoir lorsqu'il n'est plus assez puissant pour évincer les plus jeunes que lui. Dans les reportages animaliers, on le voit alors partir, souvent blessé, pour s'exiler un peu plus loin et mourir. Ce qui est l'ordre établi dans le règne animal ne peut être entériné par l'homme sous peine de régression dans le règne précédent. Que nous le fassions encore au XXI° siècle ne signifie pas que ce soit une fatalité. Nous pouvons en sortir. Pour cela, il faut d'abord l'analyser, puis avoir la volonté de le combattre.

L'autre aspect de la question est la soumission du plus faible. Cette soumission non plus, n'est pas une fatalité...

À ce propos, comment devient-on victime chronique ?

En règle générale, l'ego de la victime (car elle en a un, bien entendu) lui enlève toute confiance en elle, et la pousse à se remettre tout le temps en cause. "Ai-je eu raison ? J'ai dû me tromper... C'est de ma faute. Je n'aurais pas dû faire ceci ou dire cela..." Bref, la victime est souvent quelqu'un d'introverti, qui se pose beaucoup de questions, et qui ne se fait pas confiance. En effet, son ego la dévalorise, lui fait peur et lui donne les mauvaises réponses. Elle devient alors incapable de s'affirmer et de résister au pouvoir de son propre ego, conjugué à l'ego de son prédateur. Le premier sert de relais au second et se retourne contre elle. La victime est née. Il est très probable que toutes les maladies psychiatriques découlent aussi de ce processus...

On a beaucoup parlé du procès de Patrice Alègre. Les journalistes l'ont présenté comme un monstre. Mais il faut savoir que dans les rêves, l'ego est très souvent symbolisé par un monstre, un alien, un démon, un dinosaure, ou le diable en personne. Par ailleurs, en règle générale, quand le malfaiteur est pris, il est incapable d'expliquer son fonctionnement. Si on lui proposait mon explication, je pense qu'il se comprendrait enfin, et qu'il l'entérinerait - avec un certain soulagement, car cela est toujours apaisant de comprendre la raison de ses propres actes. Dans la mesure où il plaide coupable, il peut venir à bout de son tueur intérieur : il serait probablement satisfait de pouvoir lui échapper.

En ce qui concerne le procès de Milosevic, on voit bien que c'est son ego qui répondait aux accusations : il est complètement identifié à son tyran intérieur, et c'est la raison pour laquelle il est incapable de reconnaître qu'il a eu un comportement de tyran, puisque l'ego ne reconnaît jamais ses torts. Pour qu'il puisse accéder à sa véritable identité, il faudrait qu'il se démarque de son ego, afin de donner la parole à son âme, c-à-d aux valeurs de son coeur. Mais dans la mesure où il ne reconnaît pas ses actes comme étant des crimes, il ne peut venir à bout de son criminel intérieur : il lui est totalement inféodé.

Cette analyse est valable pour tout être humain qui cherche à établir son pouvoir sur ses semblables dans le monde extérieur :

Les parents qui veulent diriger la vie de leurs enfants adultes. / Les chefs d'entreprise qui exploitent leurs ouvriers. / Les politiques qui manipulent le peuple. / Les gourous qui s'insinuent dans le mental de leurs adeptes. / Les religieux qui veulent convertir autrui, et sont parfois sûrs de leurs convictions au point de tuer. / Les enseignants qui agissent injustement avec leurs élèves. / Les élèves qui agressent un enseignant ou un camarade. / Les médecins qui méprisent leurs patients. / Les jeunes (ou vieux) délinquants qui prennent de force ce qui ne leur appartient pas. / Les meurtriers qui frappent et assassinent leurs victimes...

Toute diabolisation d'autrui est la marque de la prise de pouvoir de l'ego. Car il est le diable dedans, mais il est capable de persuader l'homme que le danger vient du voisin dehors, en se projetant lui-même sur ce voisin.

L'ego est à la racine de tous les dysfonctionnements de notre humanité...

... de celui qui n'a aucun pouvoir social, et qui ne peut dévorer que ses proches... à celui qui devient chef d'état, et qui va pouvoir dévorer son peuple, ou le peuple voisin... en passant par tous les étages de l'échelle sociale. Dans tous les cas....

... l'ego est à l'oeuvre et dévore notre âme.

Jusqu'à présent, ni les religions, ni les philosophies, ni les régimes politiques, ni les explications de la psychologie et de la psychanalyse, n'ont pu venir à bout des injustices, des exactions et de la barbarie qui sévissent encore dans notre humanité. La question est toujours restée entière :

Pourquoi l'homme est-il partagé entre le bien et le mal ? Pourquoi ne peut-il pas choisir résolument le premier, et laisser tomber le second ?

L'approche traditionnelle montre l'homme oscillant entre deux tendances contradictoires, et basculant parfois vers l'une (positive) et parfois vers l'autre (négative). On ne voit donc qu'une seule personne, identifiée à son apparence physique, à son corps.

Le problème est radicalement différent si l'homme est double. Deux personnes habitent à l'intérieur de lui. L'une est sa véritable identité, l'autre est un ennemi. Pour qu'il puisse se battre contre cet ennemi, il faut qu'il en prenne conscience, sans quoi il lui est impossible de se démarquer de quelqu'un qu'il croit être lui-même. C'est à la fois extrêmement simple, et absolument essentiel. La plupart de mes thérapies sont fondées sur cette base, et les résultats obtenus m'encouragent à penser que cette analyse est juste. Pourtant, j'ajoute que parfois, le pouvoir d'un proche (souvent les parents ou un conjoint, parfois un gourou) se substitue à celui de l'ego, qui n'a alors rien d'autre à faire qu'à persuader le sujet de se soumettre.

Toutefois, il arrive que l'ego se manifeste malgré tout, en utilisant en général (contre le sujet lui-même ou contre ses proches) les mêmes fonctionnements néfastes utilisés par le parent incriminé. Car l'ego n'est pas un créatif. Il s'appuie sur la tradition et les idées reçues (plan collectif), et sur les modèles qu'il a vus fonctionner depuis la petite enfance (plan personnel) et qu'il lui suffit de reproduire.

C'est pourquoi l'éducation moderne n'est pas la seule en cause. L'exemple donné par les parents est souvent déterminant, surtout s'il est néfaste (cf le Conte de Perrault).

Un père violent assassine l'âme de son enfant. Reste l'ego, qui risque de reproduire le même fonctionnement sur plus faible que lui. Quand s'ajoute à cela une mère qui ne protège pas son enfant, ou dont les comportements le font souffrir, la confusion est facile : L'ego projette sur une femme indifférente le comportement maternel qu'il déteste, et il le résout par la violence : il viole et tue. Cette analyse pourrait être le décryptage de Patrice Alègre. Elle a du reste été faite. La seule chose que j'ajoute, c'est que c'est son ego qui a tué, ce n'est pas lui. Ce n'est pas pour le dédouaner, c'est pour lui permettre de se battre efficacement contre son fauve intérieur. Cette précision répond à une demande de plus en plus forte : Comment soigner les criminels afin de les rendre inoffensifs ?

Chaque être humain est unique.

Le même père (violent) peut induire des fonctionnements complètement différents, selon le caractère de l'enfant (cf Oedipe). S'il est introverti et naturellement pacifique, il peut être attiré par la prêtrise et se consacrer à Dieu, ce Père idéal, pour compenser les manques de son géniteur. Mais il peut aussi bien résoudre son problème par le suicide... Car il faut bien comprendre que chaque être humain traite l'information selon le discours de son ego, qui dépendra lui-même du caractère du sujet, de son vécu, et de l'importance de sa zone consciente. Le même événement favorisera chez l'un le sacrifice de soi, et chez l'autre la prédation, avec tous les fonctionnements intermédiaires imaginables.... Cela dit, le sacrifice de soi exprime, d'une certaine façon, le meurtre de sa propre âme, alors que la prédation débouche sur le meurtre d'autrui. De toute façon, il y a meurtre. C'est pourquoi les religieux sont souvent intolérants, avec des comportements inacceptables : si c'est leur ego qui les a poussés dans cette voie, cela explique la pédophilie, l'hypocrisie et la méchanceté dont certains sont capables : les "bonnes" soeurs ne méritent hélas pas toujours cet adjectif, tout le monde le sait, même elles, je suppose... (voir le dossier sur le corporatisme)

Chaque être humain possède une âme, qui est sa véritable identité et à laquelle il est urgent de donner enfin le pouvoir.